Euthanasie : une piqûre, deux morts...

Publié le par Claire Fourcade

Euthanasie : une piqûre, deux morts...

L’auteure de ce texte est médecin en soins palliatifs à Narbonne (France)

 

Comme une vague qui inlassablement revient sur le rivage, trois nouveaux projets de loi sur l'euthanasie viennent de s'échouer sur les bureaux de l'Assemblée Nationale. L'encre des précédentes discussions sur ce sujet  n'est pas sèche. Elles ont duré quatre longues années pour aboutir à une loi dont les recommandations d'application n'ont même pas encore été publiées et déjà l'on nous convoque pour réfléchir à la suivante.

Vendredi matin, un interviewer pugnace, d'aucuns diraient agressif, relançait le sujet : «Vous accompagnez les patients et, s'ils vous demandent d'aller jusqu'au bout, vous n'allez pas les laisser tomber. C'est votre travail de médecin, je ne vois pas où est le problème !» Il l'a répété plusieurs fois, il ne voyait vraiment pas.

 Ce monsieur a-t-il déjà essayé de chloroformer ses chatons ?

Car moi je vois bien déjà une partie du problème.

Pour chacun de mes patients parler de sa souffrance, de son angoisse, de sa mort, c'est difficile. Très difficile. La parole vient lentement, durement. Elle se noie de larmes et s'étouffe de sanglots.

Alors j'écoute. Avec les oreilles bien sûr, mais aussi avec les yeux pour mieux entendre ce qui ne peut pas se dire, avec les mains pour toucher du doigt la douleur et le mal, avec ma voix pour relancer d'une question les mots qui s'étranglent, avec mon corps tendu qui jamais ne se relâche pour ne pas renvoyer à la solitude de ma lassitude celui qui me fait face et qui, au prix d'efforts que je ne peux qu'imaginer, exprime ses peurs les plus profondes.

Je dois à celui qui souffre et qui me fait confiance  cette attention, cette tension.

De ces consultations je sors toujours épuisée.

Alors, si je devais ensuite en point final de ces conversations, même si on me le demandait, tuer celui qui m'a parlé: préparer la seringue, entrer dans la chambre, dire un mot (lequel d'ailleurs?), injecter les produits, recueillir le dernier soupir, consoler la famille et signer le certificat ; alors je crois que, moi aussi, je mourrais.

Le médecin en moi mourrait.

Car comment ensuite prendre à nouveau le risque d'écouter vraiment ?

Comment ne pas devenir alors un gigantesque cimetière, une nécropole de champs de bataille ? Je ne veux pas devenir un monument aux morts.

 

J'accompagne des vivants qui n'ont que faire d'un médecin qui serait mort à l'intérieur.

 

Dr. Claire Fourcade,

Pôle de soins palliatifs.

Polyclinique le Languedoc, Narbonne

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G
Ce que dit le Dr. Fourcade est une extrême pertinence par rapport à M. Vincent LAMBERT. Ne l'oublions pas. Elle sait de quoi elle parle. Et notamment, du Serment d'Hippocrate.
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F
Je respecte le témoignage de l'auteur, cependant, je n'adhère pas. Je pense que chacun doit être libre de choisir a fin de vie. Il y a un côté égoïste dans les phrases de cette article, le "je" en témoigne. En tant que médecin, lequel certes, à signer le serment d’Hippocrate, il ne faut pas oublier le droit du patient qui lui n'aura pas la même vision puisque, c'est lui qui souffre. Je respecte beaucoup les difficiles métiers du corps médical mais je respecte d'autant plus, la parole ou souhait d'un malade qui souffre et qui ne demande qu'à abréger ses souffrances, j'essaye de ma mettre à sa place et sincèrement, je demanderai qu'on m'aide à partir dignement et en endurant le moins de souffrances possibles.
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D
Félicitations Claire pour cette prise de position. Il me semble que nombre de partisans de l'euthanasie perdraient de leur verve et même leur conviction... si on leur demandait d'être eux-mêmes les bourreaux des hommes et femmes dont ils réclament la mort. Vous êtes une femmes de cœur et vous savez discerner les vraies solutions pour ne pas verser dans cet égocentrisme qui consiste à jeter tout ce qui peut devenir une gène....
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L
déballage dégoutant de pathos pour servir une petite morale conservatrice. Respecter la dignité d'une personne c'est ne pas se prendre pour son père, son dieu ou sa conscience.<br /> Inutile de dérouler une pseudo poésie ("écouter avec les yeux") pour défendre une volonté farouche de prolonger les souffrances d'un être humain dont plus rien n'atténue la douleur quotidienne et désormais incapable d'établir de communication avec ses semblables humains.<br /> Alors pleurnichez ailleurs où changez de boulot. De grâce.<br /> La vie n'est pas une valeur suprême à la beauté indépassable. Le mot « vie » peut servir une abstraction commode. Il y a des vies. Parfois longues et tranquilles, parfois marquées du sceau de la déveine et du malheur mais toujours absurdes par leur fatal dénouement.<br /> Et puis si la "Vie" revêtait une authentique valeur, il faudrait sur-le-champ secourir ces milliers qui la perdent chaque jour, dans la misère et le dénuement, à l'abri des discours des réseaux sociaux où l'on s'épuise dans d'ahurissantes analogies (les chatons !!) à démontrer que l'on est plus humain que les autres.
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X
C’est justement parcequ’ils ne sont pas assez courageux pour le faire eux mêmes que ces gens demandent aux médecins de le faire à leur place, cela s’appelle faire mourir dans la dignité. Merci docteur de ce témoignage c’est là qu’est la vraie dignité.
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L
Les donneurs de leçon à cette médecin n'ont qu'à le faire eux, poser ce geste de donner la mort. Car finalement ce n'est pas un geste médical. C'est un geste totalement inverse. Vous avez tout mon soutien madame, et mon admiration en cette situation qui est la vôtre et qui n'est pas évidente. Merci pour ce que vous faites pour vos patients. N'oubliez jamais le serment d’Hippocrate, au-delà des lois, c'est ce serment qui est le fondement de votre métier et son cadre.
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L
On verra si un jour l'un de vos proches souffre atrocement depuis des années et qu'en vous regardant dans les yeux il vous supplie d'abréger ce calvaire. Là, vous pourrez lui sortir votre beau serment et quelques textes de poésie choisis...
E
Merci Claire pour ce très beau texte que j'ai pu faire lire cette semaine ... Eric
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F
à Domi,<br /> Ce que vous occultez, c'est que 100 % des patients à qui l'on donne enfin ces temps d'accompagnement, dans la vraie dignité qui les refait hommes et femmes dans l' état même de leur souffrance, ne désirent plus du tout ensuite qu'on les tue! Ce pourquoi ils étaient en demande réelle leur a été donné, et ils veulent vivre ce qui leur reste à vivre! Accompagnés, écoutés, soignés, et non pas seuls, comme des "maladies" à évacuer pour le bien être des autres.
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D
Ce que vous dites est beau et respectable, mais cependant, c'est le point de vue du médecin qui est bien vivant, et qui rentre chez lui après avoir aidé les patients. Ce n'est pas le point de vue des malades qui souffrent et qui se voient parfois refuser la mort qu'ils réclament.<br /> Dans ce domaine délicat, j'avoue ne pas avoir de réponse, mais j'ai quand même une question...<br /> Avec tout mon respect pour votre conviction.
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B
Merci du fond du coeur.
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T
Merci vraiment de ce texte qui decrit tres bien la pratique palliative et cet investissement dans toutes les dimensions.. les unites de soins palliatifs sont bien des lieux de vie et il est essentiel que nous puissions rester bien vivants aupres des patients ...
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B
Merci à vous, Docteur, pour cet éclairage "lumineux" et fraternel, bien sûr qu'un docteur digne de ce nom ne doit jamais être un bourreau... Respect pour nos anciens, qu'ils puissent s'éteindre entourés de leurs proches, aimés jusqu'au bout ; merci au personnel soignant, aux infirmières, aux médecins qui exercent leurs tâches respectives, non seulement dans les règles de la déontologie de leurs métiers, mais avec respect et affection. Surtout ne laissons pas le corps médical seul face à la mort de nos proches !
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D
Très bel article émouvant et sobre. Une présence, un regard, un geste discret et de l'apaisement si possible. Mais surtout pas une seringue qui donne la mort sans respecter ce qui reste de vie.
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R
Merci pour ce magnifique article qui montre bien le rôle du médecin qui ne sera jamais celui d'un bourreau car on n'est pas médecin pour devenir un tueur.Honte à ceux qui font des lois bien au chaud dans leurs bureaux, et qui n'ont que faire de la concrétisation de ces lois qu'ils voudraient faire appliquer à des êtres sans conscience...
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D
Bravo !
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R
Merci au Dr Claire Fourcade pour ce trés beau texte.<br /> je partage complètement son analyse et son ressenti
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R
BRAVO pour ce texte très touchant !<br /> Pour avoir accompagné des centaines de personnes jusqu'à leur mort, je me permets de réagir. Eh oui on sort épuisé, exsangue, de tels entretiens.
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J
Merci pour ce sincère témoignage qui est tout à fait en accord avec mes convictions et celle de notre mouvement JALMALV (Jusqu’A La Mort Accompagner la Vie). Bravo !
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Y
Très beau texte. Merci.
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V
Merci. Je partage son avis. On accompagne des "vivants" ... et ce jusqu'au bout. Merci Docteur Claire Fourcade pour votre témoignage, merci.
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C
Magnifiquement dit MERCI POUR EUX , pourMOI pour NOUS TOUS
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G
Cela fait bien longtemps que je n'avais lu une parole humaine sur ce sujet. En tant que médecin retraité, je serai heureux de rencontrer une telle âme au dernier jour....
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P
Oui cette consœur à le droit de penser ce qu'elle dit. Cela n’empêche pas que d'autres pensent "différemment" comme le droit de mourir dans la dignité. Avec l'avancée en age, avec l'arrivée de perte d'autonomie même minime, la perte de liens social, la perte "d'utilité" , la personne change imperceptiblement de raisonnement et peut envisager de ne plus vivre sa vie.
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B
Merci de lire Aktion T4 sur wikipedia et les sommes "Aktion T4" de ALY et TREGENZA :<br /> <br /> – « Seduced by Death: Doctors, Patients, and the Dutch Cure » par Herbert HENDIN, sur l’euthanazie aujourd’hui, hoquet du cœur et de la racine de la SHOAH, définis par Götz ALY dans sa somme « Les Anormaux Les meurtres par euthanasie en Allemagne (1939-1945) » et par Michael TREGENZA dans sa somme "Aktion T4".<br /> <br /> – « HEYDRICH et la solution finale » d’Edouard HUSSON, décodage de la systémique du Totalitarisme génocideur barbare et du lien euthanazie-SHOAH-massacre des élites polonaises et des prisonniers russes.<br /> <br /> – « Je suis debout L’aîné des enfants d’Outreau sort du silence » par Chérif DELAY avec Serge GARDE.<br /> <br /> – « Les cultes de l’enfer » de Dominique CELLURA sur le satanisme, coeur du système France aujourd’hui, complété par « Au Cameroun de Paul Biya » de Fanny PIGEAUD, pages 110-118, sur le fait que tout le monde, hommes, femmes et enfants, passe à la casserole sacrificielle sataniste létale avec actes de barbarie.<br /> <br /> – « B … comme barbouzes » de Patrice CHAIROFF et le DVD « La Françafrique » de Patrick BENQUET : la France Totalitaire Génocideuse est issue du SAC et de FOCCART. La franc-maçonnerie a accompagné les génocides de la Terreur au Congo-Brazzaville-Beach.<br /> <br /> – « Escadrons de la mort, l’école française » de Marie-Monique Robin qui décrit le RSHA, le Reichsicherheitshauptamt français.<br /> <br /> – « La mafia des sectes » de Bruno FOUCHEREAU sur « LUCIFER ABC » qui décode le génocide du Rwanda.<br /> <br /> – « Le Guide des sociétés secrètes » de Jean-Pierre BAYARD (expert encyclopédique de la franc-maçonnerie et auteur d’un ouvrage sur « Les pactes sataniques ») qui dresse le tableau de la nébuleuse occultiste qui a mis la France sous contrôle.<br /> <br /> – « La sorcellerie au cœur de la République » de Sylvie JUMEL, énarque.<br /> <br /> – « L’affaire Alègre, la vérité assassinée » de Gilles SOUILLES sur l’omerta systématique sur les rituels de pouvoir avec viols, supplices et massacres.<br /> <br /> – « Outreau la vérité abusée » de Marie-Christine GRYSON-DEJEHANSART et « Cult and ritual abuse » de James Randall NOBLITT et Pamela Sue PERSKIN, sur le versant pédocriminalité rituelle : la pédocriminalité sera revendiquée (cf le consentement à 13 ans de 2 ministres LREM) après l’euthanazie via la condamnation du "populisme pénal".<br /> <br /> – « Retour à Outreau Contre-enquête sur une manipulation pédocriminelle » de Jacques THOMET, l’auteur prenant ses distances avec Alain SORAL dans l’introduction.<br /> <br /> – « Les disparus de Mourmelon » de Eric BELLAHOUEL, sur les RHOEM français.<br /> <br /> – « La France au coeur du génocide des Tutsi » de Jacques MOREL sur la décinaison logistique de « LUCIFER ABC » avec le sorcier du couple HABYARIMANA et « Noir Chirac » de VERSCHAVE sur le génocide officiellement maçonnique, avec complicité active de l’ONU, du Congo-Brazzaville-Beach.<br /> <br /> – « Hitler et l’Ordre Noir » d’André BRISSAUD, « Les racines occultistes du nazisme » de Nicholas GOODRICK-CLARKE, « Hitler et les sociétés secrètes. Les sources occultes du nazisme » de René ALLEAU, sur le Satanisme Au Grand Jour comme hoquet du nazisme.<br /> <br /> – « Les origines occultistes de la franc-maçonnerie » de Jean-Claude LOZAC’HMEUR, universitaire, « Lucifer dethroned » de William & Sharon SCHNOEBELEN, "Je servais Lucifer sans le savoir" de Serge ABAD-GALLARDO, confirment « Lucifer démasqué » de Jean KOSTKA/Jules DOINEL, après 100 ans d’aveuglement lié à l’intox experte de TAXIL : les loges bleues sont le paravent de la nébuleuse occultiste et de son noyau gnostique luciférien létal tireur de ficelles des génocides, sur le modèle archétypique de la Société de Thulé mère porteuse d'HITLER.
B
Merci Madame pour ce texte qui m'a vraiment bouleversé mais aussi réconforté en sachant qu'il y a des médecins de votre immense grandeur d'âme.<br /> A 82 ans, j'essaie de tenir le coup pour accompagner le plus longtemps possible ma petite épouse (81 ans 58 ans de mariage) et qui est en EHPAD depuis 3 ans. J'ai peur de l'avenir. Merci encore
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