Les miracles ont un coût
Avertissement introductif : certes, il convient de garder en mémoire le refus d’acharnement thérapeutique, l’empathie et la compassion à l’égard du patient. Toutefois, le souci d'économie risque de pousser à porter des pronostics vitaux graves dans des situations qui ne le justifieraient pas. En filigrane se cache la difficulté croissante de déterminer un pronostic définitif. Le texte ci-dessous nous semble démonstratif de cette problématique. Il doit aussi être situé dans un contexte culturel et légal qui est différent du nôtre.
Le Dr Zitter et ses confrères jugeaient le cas de la patiente désespéré et en ont informé la famille. Quelle décision prendre? Enchaîner par des soins lourds qui dans le meilleur des cas ne retarderaient l’issue que de peu de temps, ou bien cesser les soins immédiatement ? A la question de la famille : « s’il s’agissait d’une personne de votre famille, que feriez-vous ?" le Dr Zitter a répondu qu’elle interromprait les soins. La famille a toutefois décidé que les soins seraient prolongés et, plusieurs mois plus tard, l’état de la patiente s’est nettement amélioré.
Le Dr Zitter qui a 25 ans de métier, s’est naturellement posé un certain nombre de questions. En général les médecins pèchent plutôt par excès d’optimisme. Dans ce cas précis, la décision de débrancher l’assistance respiratoire aurait-elle été une erreur ? Parler de guérison « miraculeuse» a une connotation religieuse, les qualificatifs de « mystérieuse, inexpliquée » peuvent être préférés.
Le praticien a dû faire face à deux risques. En interrompant les soins, elle aurait supprimé la possibilité d’une guérison inattendue. En continuant les soins, elle s’est exposée à un risque beaucoup plus probable : condamner un patient, qui n’a raisonnablement aucune chance de voir son état s’améliorer, à passer le restant de sa vie branché à des machines qui vont le faire respirer, le nourrir. Tous les sondages auprès du public montrent que cette option n’est jamais retenue. On peut certes penser qu’il s’agit d’une loterie : demander la prolongation des soins donne au patient une chance sur un million de survivre. Mais dans quelles conditions et à quel prix ?
Sources :
- Jessica Nutik Zitter Miracles Don’t Come Cheap
http://opinionator.blogs.nytimes.com/2015/10/21/miracles-dont-come-cheap/
- N A Christakis Death Foretold: Prophecy and Prognosis in Medical Care