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fin de vie

Les médecins se prennent-ils pour Dieu ?

Publié le par Louis Lacaze

Les médecins se prennent-ils pour Dieu ?

Les progrès réalisés par la médecine en peu de temps peuvent impressionner. IRM, antibiotiques, techniques chirurgicales ; nous sauvons des millions de vies. Ces progrès peuvent nous inciter à croire que tout se trouve à notre portée. Mais gardons-nous de nous prendre pour Dieu.

 

Si la médecine a réalisé des progrès, la médaille a son revers ; certaines infections résistent aux antibiotiques, beaucoup de praticiens pratiquent une médecine agressive de peur de se voir reprocher de ne pas avoir fait le maximum pour leur patient.  Ne se prend-on pas pour Dieu lorsqu’on maintient le patient en vie alors que la mort est inévitable quoique l’on fasse ? N’est-ce pas torturer le patient que de le faire souffrir en cherchant à le maintenir en vie à tout prix ?

 

Nous ne soignons pas une maladie, nous soignons le patient, et il peut mourir. La mort peut représenter la paix. Un acte d’amour, de compassion, un cadeau.

 

Nous pouvons nous prendre pour Dieu de deux façons : soit en faisant tout notre possible pour retarder la mort sans prendre en considération le prix à payer par le patient, la famille, soit en laissant les choses suivre paisiblement leur cours avec compassion, dignité.

 

En tant que médecin, je dois soigner les malades et soulager leur souffrance dans le cadre de la législation existante. Lorsque j’irai rejoindre mon créateur,  j’espère qu’il saura voir que j’ai agi par amour pour mon prochain.

 

Commentaire de Bernard Pradines

Ce texte est fortement imprégné de la spiritualité religieuse que l’on trouve couramment outre-Atlantique. Une occasion pour apprécier l’influence de la culture sur la médecine.

 

Sources :

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Euthanasie : une piqûre, deux morts...

Publié le par Claire Fourcade

Euthanasie : une piqûre, deux morts...

L’auteure de ce texte est médecin en soins palliatifs à Narbonne (France)

 

Comme une vague qui inlassablement revient sur le rivage, trois nouveaux projets de loi sur l'euthanasie viennent de s'échouer sur les bureaux de l'Assemblée Nationale. L'encre des précédentes discussions sur ce sujet  n'est pas sèche. Elles ont duré quatre longues années pour aboutir à une loi dont les recommandations d'application n'ont même pas encore été publiées et déjà l'on nous convoque pour réfléchir à la suivante.

Vendredi matin, un interviewer pugnace, d'aucuns diraient agressif, relançait le sujet : «Vous accompagnez les patients et, s'ils vous demandent d'aller jusqu'au bout, vous n'allez pas les laisser tomber. C'est votre travail de médecin, je ne vois pas où est le problème !» Il l'a répété plusieurs fois, il ne voyait vraiment pas.

 Ce monsieur a-t-il déjà essayé de chloroformer ses chatons ?

Car moi je vois bien déjà une partie du problème.

Pour chacun de mes patients parler de sa souffrance, de son angoisse, de sa mort, c'est difficile. Très difficile. La parole vient lentement, durement. Elle se noie de larmes et s'étouffe de sanglots.

Alors j'écoute. Avec les oreilles bien sûr, mais aussi avec les yeux pour mieux entendre ce qui ne peut pas se dire, avec les mains pour toucher du doigt la douleur et le mal, avec ma voix pour relancer d'une question les mots qui s'étranglent, avec mon corps tendu qui jamais ne se relâche pour ne pas renvoyer à la solitude de ma lassitude celui qui me fait face et qui, au prix d'efforts que je ne peux qu'imaginer, exprime ses peurs les plus profondes.

Je dois à celui qui souffre et qui me fait confiance  cette attention, cette tension.

De ces consultations je sors toujours épuisée.

Alors, si je devais ensuite en point final de ces conversations, même si on me le demandait, tuer celui qui m'a parlé: préparer la seringue, entrer dans la chambre, dire un mot (lequel d'ailleurs?), injecter les produits, recueillir le dernier soupir, consoler la famille et signer le certificat ; alors je crois que, moi aussi, je mourrais.

Le médecin en moi mourrait.

Car comment ensuite prendre à nouveau le risque d'écouter vraiment ?

Comment ne pas devenir alors un gigantesque cimetière, une nécropole de champs de bataille ? Je ne veux pas devenir un monument aux morts.

 

J'accompagne des vivants qui n'ont que faire d'un médecin qui serait mort à l'intérieur.

 

Dr. Claire Fourcade,

Pôle de soins palliatifs.

Polyclinique le Languedoc, Narbonne

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