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Les thérapies relationnelles (1/4)

Publié le par Bernard Pradines

Il s’agit ici de l’art, de la musique, des ateliers autobiographiques, des spectacles de clowns, de la présence d’animaux,  des jardins dits thérapeutiques ou même  des robots qualifiés d’émotionnels ; une approche pas à pas, à tâtons, empirique, collective ou individualisée en fonction du contexte et du résultat obtenu dans l’accompagnement.

Pour ma part, j’ai perçu un changement radical à partir du moment où une animatrice est arrivée dans le service de Soins de Longue Durée [1] du Centre Hospitalier d’Albi en 1999, lieu d’hébergement et de soins où j’ai exercé pendant 18 ans et demi. Nous avions alors posé de prime abord l’indication d’animation pour les patients en souffrance physique et/ou psychique exprimée ou observée en particulier chez les personnes qui notifiaient leur ennui; il s’en était suivi une diminution nette, longtemps attendue, des médicaments psychotropes tels que les neuroleptiques ou les benzodiazépines, ainsi que des antalgiques.

De manière plus générale, nous avons connu bien des espoirs dans la recherche sur les médicaments contre la maladie d’Alzheimer et les affections apparentées. Entre autres, la perspective d’un vaccin a longtemps entretenu les espérances.

Une lente prise de conscience nous a amenés à faire le deuil pour longtemps du médicament-miracle. Ceci a conduit à réorienter l’accompagnement de ces patient(e)s vers un renforcement de toute mesure non médicamenteuse propice, le fut-elle pour une seule personne.

En 2003, la principale agence de santé française, l’ANAES [2], énonce que « l’accompagnement des malades et de leur famille, l’organisation de leur prise en charge et des interactions des différents professionnels nécessitent une réflexion globale mais les réponses ne peuvent être à ce jour de nature scientifique. » A nouveau en décembre 2011 dans les écrits de l’HAS [3] qui a succédé à cette première agence, il est confirmé dans le domaine des thérapies non médicamenteuses que : « aucune des approches actuellement utilisées n’a réellement fait la preuve d’une quelconque efficacité. » Depuis 2011, la donne n’a pas changé malgré la conduite d’études telles qu’ETNA 3 comparant trois approches non médicamenteuses[4]. Bien sûr, ceci ne préjuge pas de l’avenir où des indicateurs plus adaptés verront le jour. De plus, une orientation actuelle envisage des interventions « multidomaines » qui conjuguent plusieurs approches, médicamenteuses et non médicamenteuses. A suivre …

 

[1] Soins de Longue Durée : anciennement dénommé « Long Séjour », ce service comportait 90 places occupées par des personnes âgées et malades.

[2] ANAES : Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé

[3] HAS : Haute Autorité de Santé

[4] ETNA 3 :

la stimulation cognitive 

la thérapie par réminiscence 

un programme de prise en charge individualisé 

 

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Pourquoi un vieillard nous gêne-t-il ?

Publié le par Janny van Liempd

Janny van Liempd est formatrice-conférencière.

Janny van Liempd est formatrice-conférencière.

Quand il y a dix ans ma mère me disait qu’elle se trouvait discriminée à cause de son grand âge, je pensais honnêtement qu’elle exagérait.  Une secrétaire de l’hôpital lui tendit un formulaire, puis la combla de bons conseils et d’explications  alors qu’elle  avait pourtant l’habitude de remplir des papiers pour des spécialistes et des laboratoires depuis la bonne soixantaine d’années qu’avait déjà duré de sa vie.  Quand elle osa dire de surcroit qu’elle était venue toute seule en voiture sur un trajet d’une soixantaine de kilomètres, on la regarda comme un grand danger de la route.

Pendant mes formations intra  des personnels de maisons de retraite et d’autres établissements de santé, je constatais également qu’il y a chez ces personnes, malgré le fait qu’elles sont souvent très  dévouées  dans leur travail et dans les  soins, un regard négatif envers « l’aîné ».  Pour les provoquer un peu, j’évoque parfois l’image du supermarché à 18 heures le soir où un vieux monsieur, la main tremblante, fait un peu retarder la queue.  La caissière très compréhensive l’aide à trouver des pièces dans son porte-monnaie mais tout le monde râle derrière lui. A chaque fois il y a au moins une ou deux stagiaires qui sortent les paroles suivantes de leur bouche : « il aurait dû faire ses  courses durant les heures creuses ». Encore faudrait-il savoir quelles sont alors d’après eux ou elles les heures creuses.

Si une voiture à  vitesse limitée (45 km/heure) les précède  le matin en allant au travail : quelle honte de les empêcher de rouler rapidement vers  leur travail, même si c’est pour y arriver en état de stress intense du fait de l’empressement.

Puis vint le jour que je me trouvai hospitalisée dans l’hôpital d’une petite ville avec une cheville fracturée.  Un soir, la porte s’ouvrit et une vieille dame octogénaire fut installée à côté de moi. Très vite après son arrivée, je découvris qu’elle était atteinte d’une démence. Le hasard n’existe pas !  J’eus ainsi la possibilité de m’appuyer sur tous les moyens de communication que j’enseigne aux aidants et aux soignants.  Malgré le plâtre, je me déplaçai vers elle avec mon déambulateur pour la regarder de face et pour instaurer un dialogue. En effet, elle était passablement agitée et aucune soignante n’était disponible pour s’entretenir avec elle. La dame se tapait très fort le côté et en même temps se reprochait énergiquement le fait d’être allée se promener.  Ensemble, nous avons passé la nuit ainsi. Le lendemain, l’équipe est venue la voir avec l’anesthésiste.  Avec les bribes de conversation encore en tête, j’ai pu compléter certains renseignements.  Puis on lui a mis une perfusion. Un peu plus tard, on est venu la chercher pour lui faire une douche au lit. Quand elle est revenue, elle était encore très consciente mais… elle ne se frappait plus. C’est alors que je me suis rendue compte que la perfusion contenait une antalgique. Alors qu’on savait très bien dès la veille  qu’elle souffrait d’une fracture d’un col du fémur. Mon cœur a pleuré.

Plus tard, durant mes formations en approches non médicamenteuses des personnes présentant des problèmes cognitifs, je me suis rendue compte qu’on ne se pose presque jamais la question de savoir si la personne agitée n’a peut-être pas tout simplement mal quelque part.

En tant qu’experte psychologue des Sapeurs-Pompiers, j’ai pu constater dans le même département le phénomène suivant : lors d’un appel urgent au numéro 15, l’infirmier ou l’infirmière en service auprès d’une personne âgée était interrogé(e)  quant à l’âge exact du patient. S’il s’agissait d’un(e) octogénaire on imposait au soignant d’attendre d’abord encore un peu. Dans quel but ? Je n’ose presque pas formuler mes soupçons, mais je me risque à avancer une hypothèse : « Débrouillez-vous encore un peu et si la personne décède entre temps, on n’aura pas travaillé pour rien. »  Ceci aurait pu être  un incident isolé. Tristement,  la vérité m’oblige à constater que c’était presque devenu la procédure habituelle.  Les Sapeurs-Pompiers en souffraient. Ils avaient tout fait pour arriver sur place dans le délai le plus court pour, finalement, recevoir cette réponse honteuse.  Mais pour ne pas provoquer la guerre, le médecin chef du département  ne dénonçait rien…

Tout doucement, j’ai commencé à comprendre que la société a développé un âgisme virulent envers les personnes d’un certain âge. Là où tout tourne autour de l’argent, l’humanisme disparaît. J’espère donc que les anciens soixante-huitards auront encore une fois de plus le courage, la force et l’énergie de se révolter contre ces injustices qui va les concerner directement très bientôt.

 

Publié dans éthique, gériatrie, formation

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