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Bas les masques en neurologie

Publié le par Louis Lacaze

Bas les masques en neurologie

Emily Anne Ferenczi, neurologue spécialiste des troubles moteurs, face à un patient masqué, se concentre sur le rythme du clignement des yeux ou son absence, un regard vide, l’absence de plis sur le masque si elle fait une plaisanterie. Elle demande au patient de lever les sourcils, de fermer énergiquement les yeux. Par contre elle ne peut détecter ni la présence d’un éventuel léger sourire ou d’une tension des lèvres, signe d’anxiété, ni faire l’examen de la septième paire de nerfs crâniens qui commande les muscles de l’expression faciale.

« Veuillez enlever votre masque un instant, pour que je puisse examiner l’ensemble de votre visage ».

Demander d’abaisser le masque implique l’accès à un nouveau niveau de confiance entre le médecin et le patient. Le Dr Ferenczi marque une pause pour laisser à la transition le temps d’opérer.

« Faites-moi un grand sourire, gonflez les joues, dites : Aa ah ». L’examen reprend un rythme classique.

Un faciès étiré ou hypomimie est une des caractéristiques de la maladie de Parkinson. Il témoigne d’un déficit en dopamine qui perturbe le fonctionnement des trente muscles du visage permettant l’expression de la joie, de la tristesse ou du désespoir. Le patient n’en parle pas mais signale que les gens pensent qu’il est en colère ou qu’il est triste alors que ce n’est pas le cas.

Ne pas pouvoir partager les émotions, ni ressentir et manifester de l’empathie !  Le risque de faussement interpréter un comportement peut contribuer à renforcer cette sensation d’isolement fréquemment ressentie pendant les deux ans de port du masque. Le moment est venu d’accorder à nouveau de l’intérêt aux visages qui nous entourent, de prendre conscience du message que nous transmettons par un sourire qui éventuellement va en déclencher un second par contagion.

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La douleur chronique, un mal mystérieux ?

Publié le par Louis Lacaze

La douleur chronique, un mal mystérieux ?

Haider Warraich, cardiologue, a souffert de douleurs extrêmes pendant des semaines et des mois à la suite d’un traumatisme dorsal. Une fois son état amélioré il a décidé d’écrire un livre, Song of our scars, pour partager son expérience, exposer comment la douleur chronique est traitée et explorer de nouvelles voies.

Le corps médical n’a pas reçu constamment de formation suffisante car la douleur chronique est complexe. Elle est  sensation mais aussi émotion dictée impliquant par exemple la mémoire et le contexte. Elle est parfois encore traitée comme une sensation purement physique qui peut se mesurer aisément sur une échelle numérique de 1 à 10.

Au départ se trouve la nociception, essentiellement la génération de signaux nerveux à partir de la peau. Le message est transmis au cerveau qui le transforme à la fois en douleur et en émotion qui interprète cette douleur. Vous pouvez recevoir tous les signaux nociceptifs que vous voulez, tant qu’ils ne sont pas passés par le thalamus, le cortex limbique et votre cortex ils ne sont pas interprétés comme une douleur. Noter que la nociception peut ne pas conduire à une sensation de douleur, phénomène constaté chez des soldats gravement blessés, leur cerveau, concentré sur le combat, ne transmet pas le message. Inversement, la douleur fantôme ressentie longtemps après l’amputation d’un membre n’est pas l’interprétation d’un signal périphérique.

La douleur a pour but essentiel la protection et la communication. Si vous continuez à marcher après une entorse vous allez aggraver la lésion. Quand vous criez, vous informez vos compagnons que vous avez cessé d’être performant ou pour les avertir d’un danger. A partir d’une intensité suffisante, la douleur est un signal d’alerte qui bloque tous les autres mécanismes mentaux.  Lorsqu’elle devient chronique, elle cesse d’être un signal d’alerte mais le cerveau suit un processus identique. La douleur est dans votre tête. Combien de victimes de douleurs fantômes ont entendu cette phrase, sous-entendant que leur souffrance est imaginaire et ne mérite pas qu’on s’y intéresse.

Le cerveau ne modifie pas son mode de fonctionnement s’il n’a pas subi un entrainement. Plus on essaie de contrôler la douleur plus elle peut occuper l’esprit et s’intensifier. Des thérapies existent, visant à atténuer la douleur dont la perception peut être détournée vers d’autres sujets : c’est la diversion. Les thérapies à visée motivationnelle  ne demandent pas que la douleur soit niée mais qu’elle entrave le moins possible les activités courantes, le risque étant de s’enfermer progressivement dans une cage de plus en plus petite. La thérapie de reprogrammation modifie la perception de la douleur par le cerveau pour qu’elle soit interprétée comme une fausse alarme.

Dans le cas personnel du Dr Warraich ce sont les séances de rééducation qui lui ont le plus apporté de soulagement. C’était très dur mais quand la douleur est insupportable on cherche à l’éliminer à tout prix. Il pratiquait ses exercices dans un environnement où il était toujours encouragé par le personnel médical.

Haider Warraich est très réservé sur l’emploi des opiacés dans les cas de douleurs chroniques, les prescrire est une décision lourde de conséquences, c’est s’engager sur une pente glissante pratiquement sans issue. Diminuer brutalement la dose d’opiacés ou les supprimer encourt le risque de suicide par syndrome de sevrage indu. De plus au bout d’une année de traitement les patients souffrent davantage que ceux qui ont reçu d’autres médicaments.

Le surnom tamalou dont sont affublés les seniors (t’as mal où pour ceux qui sont allergiques aux devinettes) laisse penser qu’ils ne sont pas à l’abri de ce mal. Que les soignants, les aidants et les familles prennent au sérieux une souffrance qui pour être dans la tête n’en est pas moins réelle.

Commentaires de Bernard Pradines. Dans la douleur chronique, on retrouve souvent une altération des voies nerveuses périphériques ou centrales. Ce sont les douleurs neuropathiques plus difficiles à traiter, en général, que les douleurs dites « par excès de nociception » dont le mécanisme est la stimulation des fibres nerveuses transmettant la douleur.

Que les soldats gravement blessés ne ressentent pas la douleur est une affirmation bien connue qui doit être sérieusement remise en question. D’une part de nombreux témoignages plaident pour la douleur immédiate. D’autre part, dès la « diversion » passée, la douleur réapparait et peut durer une vie entière, aggravée par l’état de stress posttraumatique. Une fois de plus, ma crainte est qu’une idéologie, ici guerrière, relativisant les souffrances engendrées par  les conflits armés, ne vienne parasiter l’appréciation médicale.

Si les opioïdes demeurent indispensables dans de nombreuses situations de douleurs, ils sont en effet remis en cause quant à leur utilisation à long terme. L’épidémie d’overdose aux USA n’est pas étrangère à la position tranchée de mon collègue américain.

Envisageons toutefois le cas par cas qui seul permet de répondre à la complexité des situations rencontrées. Les « consultations douleur » ne se réalisent  pas en cinq minutes et font appel à plusieurs disciplines.

Source :

Publié dans douleurs

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